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Kirschenmus

Kirschmus, Chriesimues, Chirsimues, Chirschmues

Kirschenmus

En bref

Le Chirschmues, ou en bon allemand le Kirschenmus, est une purée de cerises noires de couleur rouge foncé presque noire. Son goût varie entre sucré, amer et acidulé. La purée est assez compacte. 

Le Kirschenmus est une spécialité régionale du canton de Berne, plus précisément de Wimmis.

La mise en conserves des fruits et des jus de fruits étaient une technique de conservation très importante jusqu’au 20e siècle. En Suisse, de nombreux produits sont fabriqués avec ce mode de conservation, comme par exemple le concentré de poires (Birnenhonig) et le vin cuit.  La particularité du Kirschenmus est le procédé de fabrication. Au cours des dernières décennies, la population se réunissait une fois par année pour préparer ensemble le Kirschenmus et ils ont appelé cette fête le « Chirschmuesen ». Cet événement public est organisé par l’Office du tourisme de Wimmis. Les touristes apprécient cette manifestation tout autant que les wimmissois qui, d’ailleurs, ne voudraient pour rien au monde abandonner cette singularité culinaire propre à leur village.

Description

Une purée de couleur rouge foncé à noire, de consistance épaisse, à la saveur sucrée, amère, acidulée.

Ingrédients

Cerises noires (Schöne von Einigen: populairement Plüderkirsche).

Histoire

On ne sait pas vraiment à quel moment les habitants de Wimmis ont commencé à cuire les cerises. Le climat de Wimmis se prête très bien à la culture des cerisiers. Le « Chirschmuesen » était alors réservé pour les personnes possédant beaucoup de cerisiers mais également du bois en grande quantité. Jusque vers la fin du 20e siècle, le Kirschenmus était apprécié à tous les niveaux sociaux de la population. Les wimmissois l’utilisaient en effet pour assaisonner leurs repas quotidiens.

Le « Chirschmuesen » était à l’origine une histoire de famille. Une agricultrice interrogée raconte : « Nous avons fait notre propre Kirschenmus jusqu’en 1986, exactement comme la préparaient mes beaux-parents avant nous. Puis mon époux est monté sur l’alpage durant l’été et nous avons arrêté. Cela aurait été beaucoup trop de travail pour moi toute seule ».

Lorsqu’en 1960 la Ligue contre la prévention de l’alcoolisme s’est intéressée à la « Chirschmuesen », la production devint publique. La devise de la Ligue était « de la purée à la place de la goutte ». Le comité d’action acheta les cerises et les faisait réduire dans un cadre plus important. Depuis, cette tradition très appréciée a pris de l’ampleur et est désormais organisée par l’Office du tourisme, pour autant que la quantité et la qualité des cerises le permettent. En 1972 et en 1982, l’événement a dû être annulé.

Par le passé, Wimmis n’était pas le seul endroit où on concentrait le jus de cerises, comme le raconte un auteur dans un article sur le produit. Concentrer, stériliser, sécher et réduire en purée, ce mode de conservation était très répandu dans toute la Suisse jusque dans les années 1960/70. Dans l’Idiotikon (dictionnaire des dialectes suisses allemands) on trouve le terme « Kriesimuos ». Il s’agirait d’une expression d’étonnement « Potz Kriesemuos ! » découverte dans un document datant de 1528. Dans l’encyclopédie de Krünitz rédigé de 1773 à 1858, on trouve aussi un certain nombre de recettes du Kirschenmus. La description « jus de cerises sans sucre ni pépins » se rapproche le plus du Kirschenmus de Wimmis. Pressez les cerises, laisser reposer le jus quelques heures, filtrer et mettre en conserves. Le jus doit être brassé continuellement. « Ce jus peut être utilisé dans de nombreuses sauces et plats pour leur donner une jolie couleur ou une saveur particulière », selon Krünitz.

Production

La production du Kirschenmus est très coûteuse. Les cerises livrées par les paysannes et paysans (en 2007, ils recevaient Fr. 3.- par kilo) étaient pesées, triées, choisies. Les quelques 20 paysans de la région livraient principalement la variété « Schöne von Einigen », qu’on appelle aussi Plüderkirsche dans le langage populaire.

Ensuite, les cerises sont équeutées, broyées dans une cuve surdimensionnée, puis la pulpe est écrasée, mais les noyaux restent intacts. Heureusement, car si l’acide cyanhydrique s’était extrait des noyaux, le Kirschenmus aurait été impropre à la consommation. Dans le temps, on pressait les cerises à la main, ce qui plaisait beaucoup aux écoliers.

La « soupe de cerises » ainsi obtenue est versée dans un sac de jute suspendu par deux crochets solides. Le jus s’écoule dans des récipients. Les noyaux et la peau restés dans le sac sont ensuite jetés.

Le jus filtré est versé dans un chaudron en cuivre d’une contenance de 300 l et cuit à petit feu durant 15 heures. Il faut remuer sans cesse pour éviter que le jus ne brûle au fond, sans quoi tout ce travail préalable aura été vain. Le temps exact de cuisson est déterminé par la teneur en sucre et le degré de maturation des cerises.

Le refroidissement de cette masse se fait aussi dans ce chaudron. Elle doit également être remuée sans cesse. Quand le tout est totalement refroidi, on peut remplir les bocaux avec le Kirschenmus. Ce produit a une très longue durée de conservation. L’auteur d’un article rapporte qu’un bocal de Kirschenmus préparé en 1944 était, 40 ans plus tard, aussi frais qu’au premier jour.

Il faut 5 kg de cerises pour faire un kilo de purée. Par année, on produit

500 kg de Kirschenmus avec 2'500 kg de cerises.

Consommation

Ce sont bien évidemment les habitants de Wimmis qui consomment le plus leur Kirschenmus, mais aussi les expatriés qui en ramènent dans leur nouvelle patrie. Les proches voisins comme par exemple les habitants des vallées de Simmental et de Kandertal connaissent et achètent cette spécialité.

Pour certaines pâtisseries de Wimmis comme les « Spitzbuben » (les fripons) ou les biscuits roulés, certains boulangers remplacent le Kirschenmus par de la marmelade de framboises.

Cette spécialité est également appréciée dans les plats salés. Elle peut accompagner les pommes de terre en robe des champs, le Ankeziger (beurre et Schabziger), les Mehlrösti ou comme ingrédient dans la moutarde de Saanen.  Dans le temps, le Kirschenmus n’était pas seulement apprécié pour sa douceur, mais également pour relever certains mets de tous les jours. L’association sucré-salé était une combinaison typique de la cuisine suisse d’antan. De nos jours, on se sert encore de cette association spécialement pour accompagner les plats de chasse avec, par exemple, les pommes, les poires ou encore des châtaignes de montagnes avec la purée de pommes.

Le Kirschenmus a aussi des vertus thérapeutiques et il s’emploie surtout pour soigner un mal de gorge ou un refroidissement. Il est conseillé d’en prendre toutes les heures une cuillère à thé, de bien le mélanger à la salive avant de l’avaler très lentement. Pour les maux d’estomac et la digestion, verser une cuillère à thé dans un demi-verre d’eau tiède et avaler lentement, le matin à jeun ou le soir après le repas.

Les diabétiques l’apprécient sur les tartines car il ne contient pas de sucre.

Importance économique

La purée est vendu dans les magasins d’alimentation «Treffpunkt » au prix de Fr. 16.- le kilo (Fr. 14.--/500 g et Fr. 10.--/300 g, en 2007). La moitié de la recette est reversée à une œuvre de bienfaisance de la commune.

Pour les familles paysannes de Wimmis, la fête du Chirschmueset est un bon moyen d’écouler les cerises noires.

... et enfin

Lentement mais sûrement, le Kirschenmus commence à être connu internationalement. Le « Slow Food Foundation for Biodiversity » a même  intégré le Kirschenmus dans l’Arche des goûts.

Sources

Fruits, légumes et plantes Imprimer

Epicentre de production

Wimmis (BE)
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